L’approche éclectique
Le mouvement éclectique est né dans les années 50. Il s’agit d’opérer le meilleur ajustement thérapeutique au cas singulier (Chambon et Marie-Cardine, 1992 ; Brusset, 2003). Le but est de déterminer quelle stratégie spécifique est la plus appropriée à un moment donné de la psychothérapie (Beutler et Consoli, 1992). Le modèle théorique de départ est enrichi par des interventions issues d’autres modèles dont les présupposés n’entrent pas en contradiction avec la méthode première. La multiplication de nouveaux modèles dans les années 60 engendre un fort engouement pour la conciliation entre les différentes approches. Ainsi certains concepts psychanalytiques comme le transfert ou l’insight sont-ils remaniés pour être intégrés au modèle behavioriste. Après ces tentatives d’ouverture des modèles théoriques, d’autres auteurs ont préconisé une approche intégrative des psychothérapies.
L’approche intégrative
L’approche intégrative vise à élaborer une théorie générale "transthéorique" et "métathéorique" de l’action psychothérapeutique. Il ne s’agit plus d’enrichir une méthode de base, mais de s’inspirer de plusieurs modèles pour en dégager les facteurs communs et spécifiques d’efficacité, et les intégrer à un modèle global. La théorie de l’efficacité de soi de Bandura (1977) ou le modèle général de Schwartz (1982) sont des exemples de modèles intégratifs d’orientations conceptuelles différentes. Des chercheurs issus de la psychologie cognitive expérimentale ont ainsi tenté d’élaborer un langage psychothérapique commun aux approches psychanalytique, humaniste et cognitivo-comportementale. Toutefois, nombre d’entre eux admettent que les principes philosophiques de ces approches sont en trop forte opposition pour qu’une telle intégration soit réellement possible. Pour Wright et Sabourin (1987), une théorisation universelle de l’esprit humain est illusoire et non souhaitable. Arkowitz (1989) suggère d’élaborer les modèles intégratifs en fonction des facteurs spécifiques de chaque théorie et non de rechercher une théorie universelle du processus thérapeutique.Comment choisir son psychothérapeute ?
Il apparaît que chacun des principaux modèles psychothérapiques est adéquat pour traiter plus spécifiquement un aspect de l’attitude des patients : la pensée (psychanalyse), les émotions (approches humanistes), le comportement (thérapies cognitivo-comportementales). Un usager pourrait donc choisir son psychothérapeute en fonction du moment de sa vie où il aura plus besoin de comprendre, de ressentir ou d’agir. Toutefois, de plus en plus de professionnels se détachent de leur école initiale afin d’enrichir leur pratique d’outils issus d’autres obédiences. La pratique psychanalytique a elle-même évolué : la neutralité de l’intervenant, qui était une condition de respect du cadre thérapeutique (Langs, 1974), est souvent considérée comme secondaire à la bonne adaptation contextuelle (Gill, 1982 ; Kohut, 1984 ; Winnicott, 1965). En outre, les méthodes du praticien ne sont pas les seuls éléments à prendre en compte dans le choix du patient. Le sentiment d’être écouté et compris par une personne bienveillante prévaut souvent sur le rattachement à une école spécifique de pensée.
Loin des laboratoires de recherche théorique, les praticiens se retrouvent confrontés à la réalité du terrain. Ils reçoivent pour mission d’atténuer le mal-être de leurs patients tout en respectant les codes déontologiques inhérents à leur profession. Aussi, nombre d’entre eux ont-ils simplement recours aux stratégies thérapeutiques conformes à leur éthique qui leur permettront de mener à bien cette mission. Au fil de leur expérience, de leurs formations complémentaires et de leurs échanges avec d’autres professionnels, ils élaborent souvent une "boîte à outils" dans laquelle puiser en fonction de la situation qu’ils rencontrent. Au final, les référents théoriques du psychothérapeute importent moins que ses qualités humaines : sa pertinence, sa bienveillance et plus généralement le sentiment de confiance qu'il inspire sont certainement les éléments les plus déterminants dans l'établissement d'une alliance thérapeutique efficiente.Références bibliographiques
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